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Clé de sol sur portée

 

« Même les servants, les lecteurs, les commentateurs et ceux qui appartiennent à la Schola Cantorum [i.e. Tout le dispositif musical dans la liturgie] s’acquittent d’un véritable ministère liturgique … de la fonction ministérielle de la Musique Sacrée dans le service divin … » (Vatican II, Constitution sur la Sainte Liturgie, N° 29 & N° 112). (8)

Introduction

l faut se persuader que la connaissance historique des siècles passés n’est pas seulement l’approche pittoresque d’époques révolues, mais la saisie d’un grand nombre de processus actuellement en cours, sans parler de l’héritage encore massif qui se maintient sous forme d’habitus culturels, de conduites de perceptions, de coutumes langagières, de divisions du travail intellectuel. Cette nécessité d’un véritable déchiffrement du passé pour comprendre les processus dans lesquels nous sommes pris aujourd’hui est un sujet d’insistance d’un certain nombre d’historiens.

 

Les observations qui en découlent font apparaître que, par exemple, l’Ecole (qu’elle soit de Belles-Lettres ou de Musique), et le type de régulation culturelle qu’elle fonde, tendent à favoriser en matière de culture des positions « centristes », par la généralisation de modèles moyens, valant par l’évitement des écarts, la correction dans l’application des règles, la production d’un plaisir pouvant avoir son lieu dans l’Ecole même (c’est-à-dire scolairement bienséant). Ainsi, le répertoire de la Musique d’Eglise se présentera le plus souvent comme un répertoire asservi, comme un art moyen, condamné à la médiocrité moins par manque de goût ou d’invention que par position dans le champ social de la distribution de la culture : cet étage n’ayant pas d’autre fonction que de consacrer les valeurs reçues auxquelles il n’atteint pas mais dont il confirme le code de production (écriture) et le code de perception (« écouter de la  musique »).

           

La musique d’Eglise, aujourd’hui comme hier, se trouve affrontée à ses vieux démons ; aussi, la tâche s’annonce-t-elle difficile pour accomplir ses fonctions sacrées : retenir le peuple à l’église (plaire, en un mot), émouvoir, sans, d’une part, tomber dans la profanité, la frivolité et la lascivité menaçantes en tout acte musical et, d’autre part, sans encourir la raillerie et le mépris, ni des « classes populaires » ou des « classes instruites » ni le mépris des « artistes avancés », sans oublier les craintes ataviques de la catholicité française.

 

L’Eglise, comme société parfaite, n’a pas pu ne pas avoir sa langue propre et, à bon droit, peut-on parler de tonalité ecclésiastique. Aussi bien, le danger ne viendra pas tant de l’envahissement du sanctuaire par des musiques profanes que de la corruption de l’oreille elle-même dans son équipement perceptif et, partant, des mœurs elles-mêmes dans un processus qui affecte toute une civilisation.

« Le besoin inspire le génie » : voilà le vrai mot. Bonne ou mauvaise, une fois déterminée la tendance d’une époque, tout se développe harmonieusement dans le même sens, car la première loi de l’esprit humain, c’est l’unité. Ainsi, une entreprise de restauration du chant et de la musique d’Eglise se présente véritablement comme une entreprise de purification des oreilles et des mœurs. L’espoir réside alors dans un renouvellement de l’Eglise par une désolidarisation complète de la civilisation du  despotisme (de l’autoritarisme) et de l’argent (donc du temps : « Time is money »).

 

Il est un autre secteur où le chant sacré devrait pouvoir prendre ses distances vis-à-vis de la musique imposée par des années et des années de paganisme : celui du rythme. Le rythme d’un chant vraiment ecclésiastique, parce qu’il est lié à l’énonciation d’un texte, parce qu’il doit en outre éviter toute agitation extérieure, doit, par dessus tout, rester « libre », tel celui d’une « récitation modulée ». L’extension importante de la pratique musicale dans les classes de la population qui accèdent à la culture et l’apparition d’un art de masse qui impose sa loi et son goût deviennent une véritable question d’identité chrétienne, dans un monde bourgeois laïcisé et laïcisant où éclectisme et pluralisme débouchent, de fait, sur un hommage au goût du plus fort.

 

En face, il conviendrait de définir les musiques porteuses de l’éthos catholique, c’est-à-dire ayant d’abord valeur de différence au monde, et, en matière de liturgie et de musique, de se battre sur deux frontières : écarter, d’une part, l’art barbare, au diapason trop grave, à la conduite vocale brutale, de bien des chantres de villes et villages, et, d’autre part, « l’art bourgeois des représentations théâtrales et des salons.»  Un autre modèle est donc nécessaire, soucieux d’une expression mobile, plus allègre, d’un diapason plus élevé, utilisant une conduction vocale très liée : le sujet chantant y fait son apparition, avec, il est vrai, son risque de dérive esthétisante, résultat d’un possible processus d’idéalisation de la musique. (7)

 

L’étude de nos comportements actuels et des besoins nouveaux de communautés profondément renouvelées apparaîtra ainsi d’autant plus utile qu’elle permettra de retrouver cette unité vitale, dont l’idée même nous enflamme, entre les différents acteurs musicaux de nos célébrations, les cadres et les contenus dans lesquels ils aspirent à trouver leur « Lieu d’Existence ». Cette démarche se vêt d’une importance accrue si l’on veut bien admettre que la catéchèse par le chant est, pour reprendre les propos  d’un célèbre Professeur d’Université, « la voix royale à l’intégration de la connaissance », pourquoi pas celle de Dieu ?

 

Dans la première synthèse d’Universa Laus (1980), l’approche renouvelée des formes du chant liturgique postulait que l’organisation du chant devait relever de trois instances en interaction : la fonction rituelle, une distribution significative d’acteurs chantants et d’auditeurs, un texte, lui-même de structure simple ou complexe. Nous y ajouterions volontiers aujourd’hui, comme on le voit, la dimension proprement cérémonielle… (9)

[ le 05/11/2014]

Chapitre 1

            Les Chorales

A quoi peut bien servir une chorale ? Evangéliser ? Eduquer ? La première option semble mener les chanteurs vers le monde séculier ; la seconde, vers ceux qui sont déjà fidèles aux liturgies. Au fait, aujourd’hui, une chorale, chargée avec d’autres de favoriser le chant commun, c’est quoi ?

        

    Typologie des chorales paroissiales

 S

elon la composition de la chorale, la problématique aura des accents différents ; elle peut être un simple groupe de quelques personnes qui chantent à l’unisson, un groupe de jeunes avec des instruments, une manécanterie ou encore un chœur polyphonique. (5)

 

Dans ces deux dernières configurations, Claude RAFFIN relève quatre formes évolutives de chorales :

1        les chorales devenues complètement profanes,

2        les chorales gardant une participation « religieuse » pour les fêtes,

3        les chorales essayant de maintenir un équilibre entre fonction séculière et fonction liturgique,

4        les chorales s’investissant délibérément dans cette dernière fonction liturgique au prix du sacrifice du « reste » … et de problèmes de recrutement. (1)

 

    Chorale ? Chœur ? Maîtrise ?

           Quelle que soit la forme du « groupe chantant », chacun de ses membres est signe de « présence à l’autre », de « présence à l’Autre ». Les aspirations propres à chaque individu et le nombre de « personnes », recevant et donnant cette « praesentia », feront que naîtra, vivra et s’épanouira, selon les lieux ou les moments, une chorale, un chœur ou une maîtrise, si les enfants « en âge vocal » y sont accueillis, car c’est aussi affaire d’éducation.

            Dans un long processus d’humanisation, l’homme s’identifie progressivement au logos qui le traverse ; il devient capable de se donner par la parole et le chant. L’acte de chant met en jeu l’homme tout entier. Il lui demande un corps disponible, une intelligence et une mémoire en éveil. En passant de la parole au chant, la voix tend à s’enrichir : elle se révèle plus claire, plus sonore, plus « haute », non pas plus forte cependant. La voix chantée illumine la parole et tout l’être. (6) (2.1. & 2.)

 

            Menaces sur l’action liturgique

            Une présence musicale est appelée à être fidèle à ce que la Liturgie demande. Ainsi, fournir une grande panoplie de styles, c’est aller jusqu’au bout du respect des fonctions. Toute Célébration doit être un chef d’œuvre de tact, d’intelligence entre le Célébrant, l’Organiste, la Chorale et l’Assemblée, avec discrétion, sans rigidité aucune. (1)

            Hélas, l’incompétence demeure le lot commun, incompétence parce qu’on n’aime pas assez en définitive. Il y a bien sûr l’incompétence technique : ce n’est pas la pire. La méconnaissance de l’acte liturgique est plus grave, parce que largement partagée, entre autres par les chefs de chœur, y compris ceux qui sont de bons musiciens. (1) A la formation musicale et vocale qui peut être donnée aux choristes (et aux autres acteurs de la Musique Liturgique), on n’oubliera jamais d’ajouter des éléments de formation liturgique et théologique : l’étude des paroles des chants et de la signification des rites fait normalement partie de la vie du chœur lors de ses répétitions ou lors de temps de formation plus spécifiques. (5)

            En outre, Les chorales peuvent aussi constituer un danger pour la Célébration parce que leur sclérose menaçante est contagieuse, parce que ce sont de puissantes forces de routine et de protection des acquis. Leur fonction est, malheureusement, d’empêcher souvent l’action liturgique de trouver son expression propre et légitime. (1)

 

         La vie de groupe

Malgré les énormes avantages de la vie de groupe pour le sentiment d’appartenance, la persévérance des efforts, l’assiduité, la partage interne des responsabilités, la vie proprement associative, il y a, en effet, danger que la chorale se constitue comme un « Etat dans l’Etat ». Comme groupe, toute chorale peut vivre des tensions entre les personnes ; il s’y crée alors des habitudes avec la manifestation de compromis implicites. Parmi ceux-ci, celui que passe le chef de chœur avec le groupe est l’un des plus porteurs de conséquence sur le fonctionnement liturgique. La présence des choristes est une présence bénévole : des ménagements sont nécessaires. La tâche n’est pas simple : certains ne supporteront pas d’entendre un mot en latin, pour d’autres, la hantise, c’est le soliste … ! (1)

Parfois, la solution à un éventuel problème de ce type passera par « l’ouverture aux autres » ; alors, si elle sait ne pas rester un cercle fermé, la chorale sera un élément moteur pour la vie communautaire de toute la paroisse. Il est d’autant plus important que ses membres ne soient pas de simples exécutants des chants, mais des personnes conscientes de leur rôle dans la liturgie et la vie de la Communauté célébrante. (5)

 

 

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comprend des  étudiants et des adultes, nécessairement musiciens, pour un

travail polyphonique sur la Musique Sacrée, ancienne ou contemporaine.

 

Onde chorale

 

L’Ensemble Vocal

se produit lors de liturgies particulière

dans les églises du Doyenné de Cambrai et, en particulier, en l’église Saint Géry et , depuis la fermeture de cette dernière, dans la Cathédrale.

lors de concerts spirituels ou encore de manifestations organisées par la Ville ou la Région.

 

Anges musiciens

 

Ses répétitions se déroulent le samedi de 14H00 à 16H00,

en la

 

Chapelle de la Maison Saint Jean-Marie Vianney

 

à Cambrai.

 

Choeurs à voix égales

Choeurs à voix mixtes

SSA (= Soprani I + Soprani II + Alti)

SAH (= Soprani + Alti + Hommes)

SSAA (= Soprani I + Soprani II + Alti I + Alti II)

SATB (= Soprani + Alti + Tenores + Bassi)

TBar.B (= Tenores + Barytoni + Bassi)

SSATB (= Soprani I + Soprani II + Alti + Tenores + Bassi)

 

            Tout adulte peut utiliser sa voix chantée spontanée soit pour son propre plaisir soit pour participer à une chorale. Du fait que cette voix existe sans apprentissage, on parle habituellement de "voix naturelle". Comment se posent les principeaux problèmes vocaux dans le cadre d'une activité chorale ?

            Problème du classement vocal. Le premier problème est de choisir le pupitre dans lequel le sujet va chanter. Dans un choeur, il n'existe habituellement que deux possibilités de classement : voix aiguë (soprane, ténor) et voix grave (alto, basse), avec, quelquefois pour certaines oeuvres, une subdivision intermédiaire (soprane II et baryton).

           Ce classement est parfois évident, surtout pour les voix extrêmes : basse profonde ou soprano léger. Par contre, il est souvent plus délicat pour les voix intermédiaires et il faut tenir compte, au départ, du registre vocal préférentiel utilisé par le choriste. C'est ainsi qu'on est parfois amené à classer dans les voix graves des chanteurs qui n'ont pas encore découvert leur "voix de tête", mais il est évident que ce classement n'est que provisoire et qu'il devra être modifié après quelques mois ou quelques années de pratique chorale.

           Problème de la justesse. Dès qu'on chante en choeur, le problème de la justesse est fondamental. On se trouve donc placé devant la situation un peu paradoxale qui consiste à demander à un chanteur malhabile et inexpérimenté une excellente justesse ... En développant son sens auditif, le choriste peut intuitivement une justesse à peu près satisfaisante, au moins dans une tessiture moyenne. Toutefois, il s'avère très vite que, pour maintenir cette justesse dans les circonstances critiques (par exemple sons pianos, notes aiguës, fin de phrases, etc.), un perfectionnement du mécanisme vocal lui-même est indispensable.

Flèche de direction

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Droit d'auteur

ensemblevocaldecambrai@sfr.fr

 

 

Le préjugé polyphonique

L’exécution à 4 voix mixtes apparaît souvent comme une espèce de « modèle », un modèle quasi sacralisé comme le summum de l’art vocal collectif, en particulier au culte. Y aspirent les chorales qui n’en ont pas encore les moyens. S’y « installent » celles qui peuvent en poursuivre l’expérience. En conséquence, un chef de chœur qui proposera l’exécution d’un unisson a souvent tendance à s’en excuser.

Cependant, l’éloge de l’unisson n’est plus à faire (cf. sa « grandeur » et sa « musicalité » dont parlent Michel VEUTHEY et Claude RAFFIN) ; certaines fonctions liturgiques gagneront à ne pas être chargées de polyphonie : une antienne de Psaume un dimanche du Temps Ordinaire, les acclamations appelant l’image de l’unanimité… La somptuosité polyphonique est aussi fonction directe de la tempérance de son usage : il n’existe pas de somptuosité par uniformité. Une des conditions du somptueux tient à ce qu’il contraste. Une chorale ne saurait être réduite à la polyphonie ; elle doit être surtout « plurivocale ».

La « vocalité », c’est le fait qu’un acte de la célébration va passer par la mise en service de la « Voix », et cette mise en service est aussi mise en valeur : c’est de la voix chantée qu’il s’agit. Or, cette voix chantée, quand elle est le fait d’un chœur, dispose d’une palette très riche de manières de s’exprimer dont on choisira « la meilleure », non en raison de ce qui serait le plus « beau » en soi, mais en raison de ce qui convient, « ici et maintenant », dans l’action célébrante en cours. La chorale, c’est, bien sûr, un chœur polyphonique dans un motet de méditation, mais c’est aussi trois voix à l’unisson dans une préparation pénitentielle, ce sont les voix successives de chantres dans les invocations d’une prière litanique, etc.…La chorale est ressource – et chance pour l’Assemblée –  quand elle réussit, par la variété même des mises en œuvre qui lui sont possibles au cours d’une célébration, à tenir ensemble ce double projet : faire du connu avec de l’inconnu (et c’est la chance pour la sécurité des esprits et des cœurs) ; mais tout autant faire de l’inconnu avec du connu (et c’est la chance pour l’incitation vive des esprits et des cœurs). (1)

 

Chanter « juste »

Chanter « juste », c’est, naturellement, faire que « Sol » soit « Sol » (dixit Joseph SAMSON), mais c’est aussi éviter le contresens sur la fonction et le moment. Or, le groupe choral peut devenir un farouche gardien, non d’une orthodoxie, mais d’une paresse mentale ; par ailleurs, une chorale « conciliaire » peut s’avérer aussi difficile à remuer qu’un lutrin de chantres ! Les habitudes d’une chorale ne sont souvent que les moyens de se mettre à l’abri d’une pérennité de pacotille : c’est l’invention qui est garante de l’immuable.

N’ayons pas peur de respecter « le silence habité du grand vaisseau » ; il permet de saisir la cohérence du moment et du lieu, tel une demi-teinte qui va de soi. Au contraire, craignons par-dessus tout ce cataclysme qui s’avance vers l’ambon : l’indécence et le ridicule d’une voix sursonorisée, (1) qui, per naturam, chantera « faux », dans tous les sens du terme.

La « tenue » des choristes

Le chant choral requiert une concentration propre : l’exécutant doit y assurer résolument le contrôle du sentiment comme de l’émoi. Un chœur, moins on le voit, mieux il se distingue, et sa « distinction » n’est pas de se mettre en avant, pas plus que de disparaître sous prétexte de ne pas nuire à l’Assemblée, elle est de se fondre dans les murs afin que ceux-ci chantent. (1)

            Dans l’humilité du service, le chant révèle à la communauté ecclésiale qu’elle a un rôle prophétique. (6) (3.4.) Compositeurs, chantres, instrumentistes ne peuvent se vouer au ministère musical en Eglise en vérité que s’ils offrent à l’assemblée de devenir sujet de la célébration en formant un seul corps et que s’ils demeurent, avec elle, à l’écoute de ce que dit l’Esprit. (6) (3.5.)

Une chorale attentive à la lecture, priante, souriante et heureuse de chanter la Louange permettra à tous de vivre plus intensément la Liturgie. Or, le rite n’a pas son but en lui-même ; on n’accomplit pas un rite pour l’accomplir mais pour atteindre, par lui, l’effet qu’il vise. C’est une nouvelle identité (membre du Corps du Christ) ou une identité renforcée que le rite confère. (5)

 

La place de la chorale en Liturgie

« Parmi les fidèles, la schola ou la chorale exerce sa fonction liturgique propre; il lui appartient d´assurer les parties qui lui reviennent en les exécutant comme il se doit, selon les divers genres de chant, et de favoriser la participation active des fidèles à celui-ci. » (PGMR, 3° version, 2005)

Dans le « concert », postconciliaire, des différents acteurs de la Célébration et dans le face à face frontal entre le couple Célébrant-Animateur et l’Assemblée, la chorale s’interpose et gêne. La redistribution des fonctions en est la conséquence mais les critères qui y président dépendent de l’idée que l’on se fait des priorités, et celles-ci s’exprimeront en termes de préséance, même si la charité chrétienne fait que le mot est banni du vocabulaire. Il suffit que ce rapport soit ressenti par les intéressés comme l’axe exclusif autour duquel se construit la Célébration pour que l’on ne sache plus trop quoi faire d’une instance qui se chargerait d’une médiation d’un autre type que celui de l’ « instruction » frontale ou du commentaire parlé.

            L’approche systémique nous enseigne que ce conflit est inscrit dans la nature des choses. Il n’est pas réductible aux querelles de personnes, pas même aux divergences de doctrine pastorale. La Chorale est à la fois contrainte et ressource. La pensée triviale nous habitue à mettre entre « contrainte » et « ressource » une opposition quasi étanche. Les « Contraintes », c’est ce dont on se plaint : elles sont essentiellement le fait des « autres ». Les ressources », c’est nous-mêmes avec nos richesses et nos moyens, hélas, pas toujours reconnus et mis en valeur.

            La réalité, c’est que toute contrainte est ressource et que toute ressource est contrainte. Ainsi, l’activité chorale au sein de l’action liturgique « traverse » celle-ci et l’alourdit au point d’être lisible comme une série de contraintes. Mais l’art du stratège est, dans une situation d’adversité, de transformer une contrainte en ressource et d’empêcher que l’inverse ne se produise. En conséquence, on relèvera trois « traverses » qu’impose la présence d’une chorale à l’action liturgique, « Corps étranger »  à l’essence de la Célébration qui serait tout aussi efficace, voire priante et belle, sans sa présence.

La première est de l’ordre du temps : le temps de la chorale n’est pas identique au temps de la Célébration, encore moins à celui de l’Assemblée, parce qu’il lui faut anticiper, préparer, se souvenir ; la deuxième est de l’ordre du groupe : la chorale est une instance autonome, un groupe  homogène et durable, distinct de l’Assemblée, susceptible de chanter à l’unisson ou en polyphonie ; la troisième est de l’ordre de la musique : la chorale contribue excellemment à « mettre en musique » ce qui n’a rien à attendre de la musique qui soit de l’ordre du nécessaire. Comme pour l’art floral, le chant accentue le caractère décoratif d’une célébration ; est-ce pour autant un artifice ? Un supplément ? Un luxe inutile ? C’est le procès classique fait à la « gratuité » quand elle « coûte ». Elle « contraint » la charité à des « ressources » moindres. Elle introduit cependant une technicité qui pour venir d’ailleurs n’en est pas moins de l’ordre de l’humainement « appréciable ».

En termes de ressources, chacun peut concevoir que pour goûter le « Banquet Eucharistique », il faut bien que certains l’aient préparé ; la chorale participe de ce temps-là ; l’Assemblée, elle, est dispensée d’avoir à se préoccuper des recettes qui expliquent un bon fonctionnement. En second lieu, observons que notre vœu d’un rassemblement fraternel, voire fusionnel, ne peut pas être séparé du vœu qu’une célébration ne soit pas n’importe quoi, n’importe comment, par n’importe qui, dans n’importe quelles conditions. Une Assemblée ne se perçoit elle-même comme telle que sur le fond de la distribution des rôles en son sein. Toute « montée en puissance » se prépare ; elle fait l’objet d’une élaboration technique ; elle exige qu’un groupe, pour favoriser l’expression collective fusionnelle, échappe d’une certaine manière à cette fusion pour l’organiser et la « techniciser » si l’on peut dire car le  « demeurer technique » des uns protège la ferveur des autres.

Si la « Musicalité » n’est aucunement nécessaire à l’acte de croire, et pas plus indispensable à l’acte de célébrer, chanter traverse cet acte de sa capacité de « troubler ». Et ce trouble est une ressource. Chanter en chœur – ma propre voix au milieu d’autres voix, mon propre chant sous la direction de quelqu’un d’autre    amplifie la ressource de cette étrangeté troublante. En effet, le chant en chœur exige à la fois l’expression la plus fidèle de ce que je suis et l’intégration à un chant commun, apparemment la plus privative d’authenticité.

Cette « technicité » dans la mise en œuvre musicale fait que la chorale contribue à manifester le retour de priorité de l’entendre sur le se voir expliquer car il y a bien un cérémonial propre du chant et la chorale participe à la scansion de ce cérémonial. Bien des célébrants et des animateurs qui craignent, détestent, voire interdisent la présence des chorales dans les célébrations, sont, en définitive, des gens qui ont bien compris l’enjeu. Ils ont une juste intuition du tort que la chorale leur fait : elle les bride dans leur propension à tout ramener à l’explication. Le cérémonial du chant fait taire les commentateurs. En effet, en situation, le chant est à lui-même sa propre pédagogie qui rend l’Assemblée active.

La fonction motrice de la chorale fournit la compréhension en acte de ce qui se passe : l’alternance chorale/assemblée et les reprises d’invocations, d’antiennes brèves, « expliquent » les choses, c’est-à-dire les rendent palpables, (1)   et ce d’autant plus que, à l’intérieur de chaque chant, une progression des moyens vocaux aura été ménagée de telle sorte que la polyphonie viendra enrichir le chant de l’Assemblée et non le noyer. (5)

Si l’Assemblée est invitée à entendre la chorale, cette activité – entendre – (car c’est bien une « activité ») est une prise directe sur ce qui se passe. L’Assemblée est ainsi invitée à se percevoir dans l’acte même d’écoute, et non dans l’état d’avoir à « se faire expliquer » des choses par des parleurs qui la dominent de leur voix sursonorisée.

Dans les deux cas qui précèdent, le chant joue son rôle pour faire entrer dans une connaissance d’un autre type que la connaissance explicative : le chant porte des paroles, et pas n’importe lesquelles, et les donne à « savourer », en « saveur » et en « sagesse », la sapientia comme art de goûter comme art de comprendre. (1) La liturgie a le pouvoir de nous éduquer et de nous rééduquer sans cesse à l’écoute, à la parole et au chant. (6) (1.11.)